Le livre du lundi: Chroniques du monde émergé, livre 1

chronique des mondes emergés 1

Nihal de la Terre du Vent

de Licia Troisi

Nihal, 13 ans, est un garçon manqué qui ne souhaite qu’une chose : devenir un vrai guerrier et peu importe si ce n’est pas le rôle d’une fille. Un beau jour, devant toute sa petite bande, elle subi une cuisante défaite face à un jeune magicien et le lendemain-même, elle décide que, pour parfaire ses talents et devenir une vraie combattante, elle doit elle aussi apprendre cet art.

Je vous le dis tout de suite : je n’ai pas fini ce livre. Il y a trop de bons livres et j’ai trop de devoirs pour consacrer du temps à une lecture que je n’aime pas.

Pourtant, certaines idées sont bonnes mais, dans l’ensemble, tout m’a déçu.

Le monde dans lequel vit Nihal est intéressant et faire vivre les habitants de la Terre du Vent dans de grandes tours percées au centre pour pouvoir faire entrer la lumière et créer des jardins me plaît ; instaurer un climat de guerre et des tensions politiques aurait pu marcher ; centrer l’histoire sur une jeune fille qui souhaite devenir un guerrier promettait de grandes choses.

Mais rien n’a fonctionné.

Troisi instaure un rythme soutenu dès le départ. On bouge, on court, on attaque, l’auteure est comme la petite Nihal qui s’impatiente de devenir guerrière. Sauf qu’elle n’invite pas vraiment le lecteur à comprendre son monde. J’ai mis du temps à clairement imaginer le milieu dans lequel vit la jeune fille. Est-ce une tour de pierre ? Une tour de verre et de métal ? Où en est le monde autours de nous ? Comment fonctionne-t-il ? Troisi ne s’embête pas avec ce genre de détails. Elle ne les sous-entend même pas. Je me suis dit que les informations viendraient au fil des pages, qu’il fallait que je sois patiente. Vain espoir.

Non seulement l’auteure ne s’embarrasse pas de détails mais elle fait aussi des ellipses narratives assez frustrantes. En effet, on commence souvent les paragraphes par des « Une semaine plus tard », « Trois jours plus tard » ou même « Deux ans plus tard » ce qui hachure la continuité temporelle et n’est pas très agréable. Mais on est aussi confronté à ce même sentiment dans le corps du texte lorsqu’elle déclare des choses sans que nous en ayons été témoins. Par exemple, on ne nous montre pas comment les relations se développent, on nous dit simplement « maintenant elle est amie avec Sennar » ou « maintenant elle aime sa tante ». C’est très dommage de se priver ainsi de ce qu’est capable d’offrir la littérature et l’écriture : nous faire comprendre les choses sans les dire réellement, lire entre les lignes. Là, l’écriture est utilisée comme un simple moyen de raconter une histoire, pas comme un art. De fait, on ne s’attache pas aux personnages. J’ai envie de savoir comment Nihal et Sennar ont fini par devenir amis, j’ai envie de savoir ce que la jeune fille a vécue pendant son apprentissage de la magie, mais non, tant pis pour moi.

Pendant cette courte lecture j’ai souvent eu la sensation d’être face à un texte brut, à quelque chose qui manque d’affinage. Je me suis dit : si Nihal, qui est une gamine impulsive et tête de mule, devait écrire un livre, c’est comme cela qu’elle s’y prendrait et ce serait les mots qu’elle emploierait. Comme preuve de ce manque de maturité, on retrouve ce genre de petites facilités un peu partout dans le texte :

troisi extrait modifié

Sachez qu’on passe cinq pages à décrire la création de cette épée et dix lignes à raconter son apprentissage de la magie qui a duré deux ans. Question de priorité, vous voyez.

Je me suis aussi dit que j’étais trop sévère, que ce livre était destiné à un public plus jeune mais je me suis vite reprise : ce n’est pas parce qu’on est un jeune lecteur qu’on doit nous servir des livres de mauvaise qualité. Je ne sais pas si c’est la plume originale ou la traduction qui est fautive mais j’ai levé les yeux au ciel très souvent. Exemple :

-oui, bien sûr…, répondit Nihal en essayant de sortir de sa torpeur et de retrouver son calme.

« Torpeur » : Engourdissement général, physique et psychique, qui tient en état de semi-conscience, de somnolence, et prédispose à l’assoupissement. Donc Nihal est déjà très calme, en fait. Et oui, chers auteurs, les mots veulent dire des choses, vaut mieux le savoir quand on écrit. Au pire, on s’offre un petit dico.

Ou encore :

Savoir que Fen était épris d’une autre femme la faisait souffrir, et elle versa même quelques larmes d’une amante désespérée.

Cette phrase manque tellement d’équilibre qu’elle ne veut plus rien dire ! « et elle versa les larmes d’une amante désespérée » ou « et elle versa quelques larmes d’amante désespérée » ce n’est pas très heureux (même très moche), mais au moins c’est français.

Certains penseront que je chipote mais comment lire un texte truffé de telles phrases ? Moi, ça me gêne atrocement. Je n’arrive pas à entrer dans l’histoire et l’auteure perd toute sa crédibilité. Il faut plus que des dragons pour justifier de tels faux-pas et il y a beau avoir plein de magie dans la vie de Nihal, il n’y en a pas une once dans l’écriture de Troisi (ou celle de sa traductrice, je ne saurai jamais). Cela m’a complètement découragé de continuer ce livre. J’en étais à la page 120.

Pourtant ce livre a l’air très apprécié sur la toile, suis-je la seule à ressentir cette déception? Ou alors dites-moi que je me trompe et expliquez-moi ce que vous, vous avez aimé 🙂

Marion

10 commentaires sur “Le livre du lundi: Chroniques du monde émergé, livre 1

  1. Oui moi j’ai aimé, ça a même été le premier coup de cœur de mon blog !
    Au début j’avais peur que ce soit trop jeunesse et finalement ça l’a fait avec moi justement grâce à ce rythme rapide et ces ellipses.
    J’ai trouvé qu’elles permettaient de bien avancer dans la vie de Nihal (même si je m’étais également fait la réflexion qu’on aurait pu avoir plus de détails sur son apprentissage de la magie), et je n’ai pas vu ma lecture passer.

    Mais je trouve intéressant d’avoir un avis divergent, si on avait tous les mêmes opinions sur les livres ce ne serait pas marrant ^^ !
    Je peux comprendre pourquoi ce livre ne t’as pas plu, tu l’expliques très bien, et avec plus de recul par rapport à ma chronique, je me rappelle également avoir noté des facilités au niveau du langage, mais qui avaient été éclipsées par mon enthousiasme vis-à-vis de l’histoire et du personnage de Nihal que j’ai beaucoup apprécié.

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    1. Merci pour ton comm! Premièrement tu as raison: heureusement qu’on n’est pas tous d’accord sur tout ^^ et il est vrai que l’enthousiasme du lecteur et l’attachement à un personnage peuvent très bien suffire pour nous permettre d’embarquer dans une histoire! Je suis contente que tu ais trouvé ton bonheur avec Licia Troisi 🙂 je suis aussi contente de ne pas être la seule à avoir remarqué quelques défauts ^^ ils m’ont plus dérangé c’est tout.

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  2. Hum, la critique est presque bien. Mais j’ai failli m’arrêter net au moment où j’ai lu que tu n’avais pas terminé le livre.
    Il me semble que pour faire une critique, il faudrait lire le livre en entier non ?
    C’est comme vouloir critiquer un série après n’avoir vu que le premier épisode.
    Dommage de ne pas laisser sa chance à quelque chose non ?

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    1. Abandonner un livre est une décision aussi importante dans la vie d’un lecteur que d’en commencer un ou d’aller jusqu’au bout d’une lecture malgré tout. J’ai commencé Chroniques du monde émergé avec la bonne intention de le finir. Je lui ai laissé sa chance à ce premier tome, je lui ai laissé 200 longues pages alors que j’aurais aimé m’arrêter à la 100ème. Je ne chronique pas tous les livres que j’abandonne mais les raisons que j’avais de le faire ici justifiaient d’apparaître sur mon blog. Merci de ta visite, ton commentaire était presque bien aussi.

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  3. Lire ta critique es très intéressante , quand j’ai commençais a lire le monde émergé je devais avoir douze j’ai étais fidèle a cette série jusqu’à qu’elle se termine.
    Cinq ans plus tars je dois avoué que je ne la trouve plus aussi bien qu’avant car il faux être honnête j’aurais lu ta critique il y a quelque année je n’aurais pas du tout aimée ton opinion aussi neutre et correcte sois t’elle, pour moi le manque de détail ne m’on jamais dérangeais comparais a toi alors en lisant ta critique je me suis replongeais dans mes vieux bouquin es je me vois obligeais approuvais ton avis.
    Je me suis habituais a présent a une lecture plus complète , je pense malgré tout que ses une excellente série pour commencé , car le plus important dans une histoire n’es t’il pas les personnages les émotions et le scénario ?

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    1. Merci pour ton commentaire! Je suis contente que tu ais passé un bon moment de lecture avec cette saga! Et si moi je n’ai pas aimé, cela ne doit pas remettre en cause le plaisir que tu as ressenti en la lisant.
      Il est normal que nos goûts s’affirment avec le temps, tout comme on grandit en taille, on grandit aussi en littérature. J’ai quelques titres dans ma bibliothèque que j’ai adorés il y a quelques années mais dans lesquels je ne remettrais peut-être jamais le nez ^,^
      Après, sur le dernier point que tu abordes, je pense que la littérature est un art complexe et que le travail avec les mots est aussi important que le scénario, l’atmosphère et les personnages: c’est un tout. Certaines histoires ont des intrigues simplissimes (Roméo et Juliette, Notre Dame de Paris, Aristote et Dante,…) pourtant la qualité du travail littéraire de leurs auteurs les sublime et en font de véritables bijoux. Alors qu’une intrigue complexe et créative perd tout son intérêt si le texte est pauvre, comme l’a été Chroniques des Mondes Émergés pour moi. Je suis peut-être sévère mais c’est mon ressenti. Et puis, on ne recherche peut-être pas tous la même chose quand on lit, il est donc normal d’avoir des attentes différentes.

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